Jean-Marie HEBTING, MKDE, 4 bis rue Nozeran
34090 MONTPELLIER.
Sylvie LAPIERRE, MKDE, 11 boulevard des italiens, 75002 PARIS.
Patrik GOUDOT, Chef de service Chirurgie Maxillo-faciale, Hôpital
Lapeyronie, 34090 MONTPELLIER.
Mots-clés : Articulation temporo-mandibulaire, anatomie, physiologie.
La physiologie articulaire permet
d'analyser la mobilité d'une articulation. L'articulation temporo-mandibulaire
possède une mobilité complexe et passionnante.
Décrivons les éléments en présence
de l'articulation temporo-mandibulaire (ATM). Ils sont pairs et à
fonctionnement synchrone (lors des premiers mouvements de succion du foetus,
le mouvement des hémimandibules est synchronisé). Ils sont
au nombre de 3, pour l'articulation proprement dite (qui assure les mouvements),
auxquels il faut ajouter les dents, qui complètent et finalisent
ce complexe (figure 1). Ces surfaces sont encroûtées non
de cartilage hyalin mais d'un fibrocartilage. Ce sont:
• Temporal. La surface articulaire est située à
la partie infrazygomatique de l'os. Elle est composée de 2 versants
en continuité (figure 2)
- la fosse mandibulaire, en arrière, qui est concave
et dont seule la moitié antérieure est articulaire (elle
est séparée de la partie postérieure par la fissure
tympanosquameuse).
- Le tubercule articulaire, en avant, qui est convexe.
• Mandibule. La surface est la tête du condyle
mandibulaire. C'est une saillie ovoïde à grand axe oblique
en dedans et en arrière. Seule la partie antérieure du condyle
est articulaire et encroûtée de fibro-cartilage.
• Disque articulaire. C'est un fibrocartilage
qui sépare la cavité articulaire en 2 parties distinctes
(figures 2 et 3). Il est épais et mobile. Il est retenu, en arrière,
par des freins ligamentaires qui empêchent un déplacement
antérieur excessif. Il est tiré vers l'avant par un faisceau
du muscle ptérygoïdienlatéral (ce
qui est indispensable puisque la mandibule avance lors de l'ouverture
de la bouche).
• Les dents. L'articulé dentaire est la finalité
fonctionnelle de la mastication. Les dents reçoivent l'essentiel
des contraintes compressivent engendrées par l'élévation
de la mandibule. Elles n'entrent en contact qu'en fermeture complète,
ou par l'intermédiaire d'un élément interposé
(aliment ou objet). Les dents sont au nombre de 32 chez l'adulte et réparties
en 4 hémiarcades. Elle portent des noms (2 incisives, 1 canine,
2 prémolaires, soit 8 dents par hémiarcade ; durant la petite
enfance, les dents sont dites déciduales, populairement appelées
« dents de lait », et au nombre de 5, les molaires survenant
plus tard), sont situées à droite ou à gauche, en
haut ou en bas. L'usage de l'OMS est de les numéroter de dedans
en dehors de 1 à 8, et de faire précéder ce numéro
d'un chiffre correspondant à l'hémiarcade à laquelle
elles appartiennent : 1 pour maxillaire droit et 2 pour maxillaire gauche,
3 pour mandibulaire droit et 4 mandibulaire gauche (pour la denture déciduale,
les chiffres des hémi-arcades sont 5, 6, 7, 8 au lieu de 1, 2,
3, 4).
Décrivons maintenant les moyens d'union (figure 3).
•
Capsule et synoviale. Elles sont doubles puisque l'articulation
est paire. Elles s'insèrent en dessous du condyle, au niveau du
col. La capsule est lâche, la synoviale est fibreuse et non graisseuse.
• Disque articulaire. C'est aussi un moyen d'union solidaire
de la capsule à sa périphérie, de l'os temporal,
en arrière, et du tendon du ptérygoïdien latéral,
en avant.
• Ligaments collatéraux. De chaque côté,
il en existe un médiat et un latéral.
Physiologie
L'ATM est une double articulation dont le rôle est
majeur dans la mastication, la déglutition et la phonation. Elle
travaille en synergie. Elle permet des mouvements de rotation et/ou de translation.
La denture joue un rôle essentiel puisqu'elle en est la surface
d'appui. Son bon état et son équilibre conditionnent le
fonctionnement idéal des ATM. Cette denture transforme les ATM
en articulations temporo-maxillo-dentaires.
Les muscles masticateurs peuvent avoir une action symétrique, synergique
ou indépendante permettant d'obtenir trois types de mouvements
à partir de la position en repos: élévation -abaissement,
propulsion - rétropulsion, diduction ou latéropulsion.
L'équilibre de forces permanent entre ces muscles est réalisé
par un tonus musculaire qui conditionne la stabilité de la mandibule.
Le rôle du ménisque (disque articulaire)
La meilleure démonstration du rôle du
ménisque est apportée par la perte de la propulsion lors
de son exérèse chez l'homme. En revanche lors d'une résection
du condyle, respectant le ménisque, cette propulsion est conservée.
Delaire a proposé un schéma de physiologie normale du ménisque
(figure 4).
- Au repos, le ménisque détendu se moule sur la cavité
glénoïde et le versant postérieur du condyle temporal
du fait de l'ascension du condyle mandibulaire.
-La contraction du chef supérieur du ptérygoïdien latéral
tend progressivement le ménisque, le redresse et en même
temps abaisse et désenclave le condyle mandibulaire de la cavité
glénoïde.
- Le ménisque étant tendu dans un plan oblique de haut en
bas et d'arrière en avant, le condyle peut avancer grâce
à l'élasticité de la partie rétro-condylienne
du ménisque dont la face supérieure pré-condylienne
glisse sous le temporal.
- Le ménisque reste stable et le condyle mandibulaire continue
à glisser en avant sur sa face inférieure en se rapprochant
de son bord antérieur, cela jusqu'à ce que les deux condyles
soient l'un au-dessous de l'autre grâce essentiellement au chef
inférieur du ptérygoïdien latéral.
Cet enchaînement de mouvements du condyle (abaissement, propulsion,
élévation) est rendu possible grâce à la présence
du ménisque et de sa spécificité. La rotation du
condyle sur son axe associée aux mouvements décrits par
Delaire produit une suite de rotations instantanées.
Le mouvement de fermeture buccale s'obtient par relâchement progressif
du ptérygoïdien latéral; il s'ensuit un recul du condyle
qui revient à sa position glénoïdienne sous l'action
des muscles élévateurs. En conclusion l'ouverture-fermeture
buccale ne peut être une simple mobilisation car elle solliciterait
le seul mouvement en rotation du condyle sans jamais faire appel à
la spécificité essentielle de l'ATM qui est la combinaison
de mouvements de rotation et de translation du condyle. En revanche, ce
mouvement forcé accentuerait encore l'enclavement du condyle, risquant
de provoquer une fracture du condyle (figure 5).
En conclusion quelques points doivent être notés
- Le ménisque est indissociable du condyle mandibulaire et suit
passivement les mouvements, sous contrôle du chef supérieur
du ptérygoïdien latéral, réalisant le complexe
condylo-ménisco-musculaire; -le condyle mandibulaire est toujours
en rapport avec la même partie du disque articulaire : sa zone intermédiaire,
mince;
- le rôle primordial du chef supérieur du ptérygoïdien
latéral lors de la translation antérieur du condyle est
une activité dans les mouvements de propulsion, déduction,
élévation.
Fig. 1: Articulation temporo-mandibulaire (ATM)
et dentaire
1 condyle mandibulaire ; 2 temporal ; 3 disque articulaire ; 4 articulé
dentaire ; 5 masséter
Fig. 2: Coupe sagittale de l'ATM
1 fosse ; 2 condyle temporal ; 3 partie antérieure (articulaire) de la
fosse ; 4 partie postérieure (articulaire) du condyle ; 5 disque articulaire
; 6 frein du disque ; 7 pore acoustique externe ; 8 artère temporale superficielle
; 9 artère maxillaire ; 10 ptérygdidien latéral
Fig. 3: Ligaments collatéraux de l'ATM en vue
supérieure
(a), coupe faciale (b) et vue frontale (c). 1. LCL : ligament collatéral
latéral ; 2. LCM : ligament collatéral médiat ; 3. disque articulaire.
Fig. 5: Reproduction de l'ouverture-fermeture
a) Abaissement de A en B, par rotation autour de l'axe, qui n'entraîne qu'une mobilisation minime en C. b)
Par contre la propulsion de A' en B' est intégralement transmise à C, qui avance en C'. Ce glissement des
surfaces osseuses est le meilleur moyen d'éviter la création d'une ankylose.